Pour notre personnel, les célébrations du Mois de la Fierté ont débuté par une conversation franche et inspirante avec Laverne Cox, la première actrice ouvertement transgenre à avoir été nommée aux prix Primetime Emmy et la première femme trans de couleur à avoir eu un rôle principal dans une série télévisée diffusée aux heures de grande écoute.

Celle qui incarne Sophia Burset dans Orange is the New Black est davantage qu’une actrice primée. Active promotrice de l’égalité des droits, elle s’exprime inlassablement en faveur de la prise en compte et de la visibilité de la communauté trans. Laverne participait à l’événement mondial organisé par RBC en tant que conférencière principale, évoquant ce qu’elle a vécu, prônant l’amour et l’acceptation, pleine de foi en l’humanité.

« Pour s’aimer, il faut cheminer »

À 52 ans, Laverne Cox se dit privilégiée d’être en vie. « Ça ne coule pas de source, surtout quand on est une femme trans noire américaine », confie-t-elle à Kris Depencier, présidente régionale, RBC qui, assise à ses côtés, vient de lui souhaiter bon anniversaire – avec quelques jours de retard.

Laverne a grandi à Mobile (Alabama) dans les années 70. Sa mère était monoparentale. Parce qu’elle fut considérée comme un garçon à la naissance, l’expression de sa féminité l’exposait constamment aux brimades et nourrissait en elle un profond sentiment de honte. Repliée sur elle-même, elle passait son temps à la bibliothèque ou regardait Solid Gold et Fame à la télévision. « Je rêvais de faire un jour ce que je fais aujourd’hui, de partir à New York, de monter sur les planches, d’être danseuse puis, qui sait, actrice. » La réalité était trop pénible. Laverne n’avait d’autre choix que de se réfugier dans l’imagination et la créativité.

Parvenue à l’âge adulte, c’est par la thérapie qu’elle trouve la guérison. « On peut guérir, à condition de travailler sur soi. J’ai 52 ans et je peux dire aujourd’hui que je m’aime en dedans comme en dehors. J’aime qui je suis, j’accepte mes erreurs, j’embrasse chacune de mes imperfections. Mais ce ne fut pas toujours le cas. Pour s’aimer, pour s’accepter, il faut cheminer. »

« Je suis une perpétuelle étudiante »

Sa mère occupait trois voire quatre emplois simultanément pour subvenir aux besoins de ses enfants. Elle n’en trouvait pas moins le temps de surveiller s’ils faisaient leurs devoirs et se maintenaient au niveau requis selon leur âge. Aussi Laverne accorde-t-elle vite du prix à l’éducation et se résout très tôt à être une bonne élève. À l’Alabama School of Fine Arts, où elle suit des cours avec équivalence universitaire (programme Advanced Placement), sa curiosité intellectuelle et sa personnalité de battante lui valent d’excellents bulletins.

Aujourd’hui, Laverne apprend encore, constamment. « J’étudie toujours – je suis une perpétuelle étudiante. La guérison, les arts, la mode, l’histoire de l’art… J’adore apprendre. » Selon elle, c’est cette curiosité permanente qui l’a conduite là où elle est aujourd’hui. « Je ne pouvais faire autrement, vu tous mes traumatismes et les mécanismes de défense qu’ils m’amenaient à imaginer. Lorsque j’ai appris le théâtre, il m’a fallu déconstruire tout cela et découvrir qui j’étais vraiment. Cela nécessitait beaucoup de curiosité et de travail sur moi-même. »

Ce qui nous est peu familier ou qui nous met mal à l’aise peut entraîner soit la peur, soit le désir d’en savoir davantage. Cette dernière attitude – celle de Laverne – lui a été inculquée par son éducation, ce dont elle s’estime privilégiée. « L’éducation est ce que la vie m’a donné de plus précieux. »

L’équité et l’inclusion exigent de comprendre que nous sommes tous des êtres humains

Sur la situation politique des États-Unis, Laverne ne mâche pas ses mots : on tend à déshumaniser ceux dont les opinions ou les valeurs diffèrent. « Après tout ce qui s’est passé depuis quatre ans, les gens sont en colère et cherchent des boucs émissaires. Cela les conduit à ne plus considérer comme humains ceux avec qui ils sont en désaccord. Nous devons voir en chaque habitant de notre planète un être humain, nous mettre à humaniser – tout un travail qui nous ramène à notre propre vulnérabilité, qui suppose de l’empathie, le désir de nouer des liens et d’établir des milieux qui soient davantage pluriels. »

L’actrice insiste : il nous faut des espaces de discussion sains où les désaccords n’empêchent pas l’amitié – où, conscients de l’humanité de notre interlocuteur, nous ayons de la bienveillance à son égard. « Si nous visons réellement l’équité et l’inclusion, nous devons faire en sorte que chacun soit perçu comme un humain ; le fait qu’il provienne d’ailleurs ne nous empêche pas de l’accueillir avec amour et empathie. »

Laverne souligne ensuite combien il importe d’avoir des débats ouverts. « Quand nous parlons de la communauté LGBTQ+, nos interlocuteurs doivent comprendre des personnes LGBTQ+. On se contente souvent de parler des personnes trans en leur absence, mais il est ô combien utile de débattre avec elles, surtout si votre interlocuteur comprend bien les enjeux, sait comment les présenter et comment rappeler qu’il est d’abord un être humain. »

Laverne rappelle la force de l’amour. « Comment faire face au dénigrement actuel, à tous ces comportements effrayants ? Pour moi, la seule façon, c’est de faire preuve d’amour. L’amour est une force puissante, capable d’endiguer la haine et la désinformation. » C’est l’amour qui permet à Laverne de voir l’Autre comme un être humain, même s’il lui manifeste du mépris. « Il nous faut opter pour l’amour et pour l’humanité. »

La surintégration s’oppose à l’appartenance authentique

Laverne Cox sait que tout commence sur le plan individuel. « Il faut commencer par soi-même. Chaque fois que je souhaite émettre une critique, je dois m’assurer que ma maison est en ordre, que ma manière d’interagir avec les autres, de vivre et de travailler est en accord avec mes valeurs. »

L’actrice ajoute que l’amour des autres est à la mesure de l’amour de soi-même, mais trouve qu’on ne consacre pas assez d’efforts à cette deuxième attitude. Nous essayons tous d’entrer dans le moule ; l’appartenance ne passe absolument pas par là. « Chercher à entrer dans le moule, c’est tenter d’être ce que les autres pensent qu’on doit être, au lieu de se montrer tel qu’on est. Je pense qu’il faut remettre en question l’intégration à tout crin et travailler l’amour de soi. »

« Dans le passé, nous avons su nous frayer un chemin »

À propos du Mois de la Fierté, Laverne rappelle les émeutes que provoqua en 1969 une descente policière au bar The Stonewall Inn fréquenté par des personnes LGBTQ+. Malgré les lois de l’époque, qui condamnaient le travestissement et les danses entre personnes de même sexe, les gens parvinrent à bâtir une communauté. Laverne évoque Miss Major Griffin-Gracy, Susan Stryker et Christine Jorgenson, trois femmes trans qui ont marqué l’histoire comme enseignantes, militantes et actrices du changement. Dans un monde où beaucoup entendent criminaliser l’existence même de la communauté trans, Laverne ne baisse pas les bras. « Nous suivons un plan. En suivant l’exemple des personnes trans ou non trans qui nous ont précédés, en puisant dans ce courant traditionnel de combat mais aussi d’amour, nous aurons l’appui de la communauté et nous nous épaulerons les uns les autres. Dans le passé, nous avons su nous frayer un chemin, nous soutenir mutuellement et bâtir des milieux où les gens s’entraident. »

Le Mois de la Fierté est l’occasion de saluer et de promouvoir la communauté LGBTQ+. Le thème de cette année est « Ensemble FIERTÉ ». Comme le rappelle passionnément Laverne Cox, nous sommes tous plus forts quand nous nous mobilisons ensemble pour une société tolérante, égalitaire et inclusive.

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