Bernice A. King, leader d'opinion mondiale, stratège et militante pour la paix, est chef de la direction du Centre Martin Luther King Jr. pour le changement social non violent. À ce titre, Bernice King s'emploie à perpétuer l'héritage légué par ses parents, la non-violence, et partage son approche à l'occasion de cet événement RBC.

Pendant une conversation intime avec William Onuwa, auditeur en chef RBC, lors de l’événement organisé à l’occasion du Mois de l’histoire des Noirs, Bernice A. King a fait part de son opinion sur l’état actuel de la société et sur la façon dont chacun peut adopter et appliquer une pensée non-violente pour susciter des changements importants et durables.

S’appeler Dr. Bernice A. King

« Pour être honnête, cela n’a pas été simple », a déclaré Bernice A. King lorsque M. Onuwa lui a demandé comment elle avait réussi à supporter la pression, les feux des projecteurs et les attentes liées à son statut de fille de deux personnalités majeures de l’histoire de l’humanité – le Dr Martin Luther King Jr. et Coretta Scott King.

Comme elle l’a expliqué, tout le monde souhaite faire mieux que ses parents, et elle a reconnu que, dans son cas, « la probabilité que cela arrive est faible, voire nulle », d’autant plus que ses deux parents continuent d’apporter leur contribution au monde actuel – même après leur décès–. Cependant, sa mère l’a aidée dans son parcours, en lui disant « il n’est pas nécessaire que tu sois comme moi. Il n’est pas nécessaire que tu sois comme ton père. Je veux juste que tu donnes le meilleur de toi-même.» Ainsi, à chaque fois que la pression ou les attentes devenaient trop fortes, Bernice A King se rappelait ces paroles.

Cette idée de « donner le meilleur de soi-même » étaye la discussion entre Onuwa et Bernice King, durant laquelle ils ont évoqué la manière dont la société – les gens, les dirigeants, les entreprises, les communautés – peut susciter un changement non-violent.

Adopter une approche non violente

On demande souvent à Dr. Bernice A. King : Que dirait votre père s’il était vivant aujourd’hui ? Et sa réponse : Nous ne savons tout simplement pas écouter. « Personne n’écoute l’autre – nous écoutons nos propres opinions, nos propres groupes, ou nos propres croyances, mais nous ne faisons pas l’effort d’écouter ce que les gens essaient vraiment de dire », a-t-elle déclaré.

Même si, selon elle, dans l’ensemble, les gens, partout dans le monde, poursuivent un objectif similaire, des tensions surgissent lorsqu’il s’agit de s’accorder sur la façon d’atteindre cet objectif.

« Alors que la plupart des gens sont d’accord avec les changements qui doivent se produire, ils ne partagent pas les mêmes points de vue quant à la manière d’y parvenir. Et, au lieu de faire les efforts nécessaires pour se comprendre et trouver des terrains d’entente, nous nous imposons plutôt des limites », a-t-elle indiqué.

Les six étapes du changement social non-violent reposent sur les campagnes et les enseignements non-violents de Martin Luther King Jr. et commencent par la collecte d’informations– c’est-à-dire une prise de recul, la compréhension et une recherche des enjeux en cause. Dr. Bernice A. King a mis l’accent sur la nécessité et l’importance cruciale de cette étape.

Alors que la collecte des informations est un processus simple, elle a expliqué qu’il s’agissait en réalité d’une des étapes les plus difficiles à franchir, car nous sommes programmés pour répondre et réagir d’une certaine manière. « Automatiquement, nous tirons des conclusions, au lieu de faire marche arrière et de prendre le temps de collecter les informations. »

Au Centre King, une partie du travail qui est effectué consiste à accompagner les gens dans cette étape, ainsi que dans les cinq étapes qui suivent. « Il y a tellement de gens qui veulent se précipiter et intervenir directement », a-t-elle déclaré. « Nous voulons agir tout de suite, mais nous oublions qu’il faut passer par la collecte d’informations afin d’avoir en main tous les éléments importants et de pouvoir aborder les choses de la bonne manière. »

Elle a ajouté qu’une approche non-violente permettait aux gens de s’intéresser véritablement aux autres, d’avoir des conversations courageuses sur les questions controversées et de restaurer le sentiment communautaire ou de créer ce sentiment. « La véritable paix ne repose pas uniquement sur l’absence de tension, elle repose sur la présence de justice », a-t-elle indiqué, expliquant que la justice commençait par la curiosité, l’écoute et la collecte d’informations.

Rétablir la confiance par l’humilité, la responsabilité et le pardon

Selon Bernice A. King, pour aller de l’avant, il faut également construire les bases de nouvelles relations, et elle explique que les gens doivent pouvoir se faire confiance pour que le changement se produise. Et pour rétablir la confiance entre les gens, une tâche qu’elle reconnaît difficile, nous devons commencer par faire preuve d’humilité. « Faire preuve d’humilité en acceptant qu’il y ait beaucoup de fragilité, de sensibilité et de cassure dans notre monde », a-t-elle déclaré.

« Vous devez faire votre introspection pour voir si vous avez déjà échoué et vous demander si vous avez fait quelque chose qui a pu être offensant ou générer des inégalités. » Sinon, les gens auront peur de s’investir à nouveau ou de donner une seconde chance si l’on ne reconnaît pas ses erreurs, quelle que soit leur importance. « Parfois, nous devons faire une pause et analyser – je ne pense pas que notre monde soit axé suffisamment sur l’introspection. »

Elle a alors prononcé ces mots : « Parler sans offenser et écouter sans être sur la défensive », et a ajouté que la responsabilité et le pardon devaient aller de pair. « Il est important de se pardonner. Ne vous culpabilisez pas si c’est vous qui avez trahi la confiance. Être capable de pardonner est tout aussi important pour ceux qui ont été trahis. »

Mobiliser le changement implique de la vigilance et une dynamique durable

Durant leur conversation, M. Onuwa a fait remarquer qu’au cours des dernières années, un certain nombre d’Afro-Américains ont accédé à de plus hautes fonctions politiques – Colin Powell, premier homme noir à occuper le poste de secrétaire d’État américain et Chef d’état-major des armées ; Condoleezza Rice, première femme noire à assumer le poste de secrétaire d’État américain ; le président Barak Obama ; et aujourd’hui Kamala Harris, première femme vice-présidente et responsable féminine ayant obtenu le rang le plus élevé dans l’histoire des États-Unis, ainsi que la première vice-présidente Afro-Américaine et la première vice-présidente d’origine asiatique.

Interrogée sur la façon dont il est possible d’entretenir la pérennité de cette dynamique, Bernice King a rappelé à son auditoire que de tels changements n’étaient pas le fruit du hasard. « Nous ne sommes pas les premiers, d’autres nous ont précédés », a-t-elle dit. « De nombreuses personnes se sont battues avec vigilance pour que des Noirs aient la possibilité d’accéder à ces fonctions. » Elle a ajouté qu’il faut poursuivre sur cette lancée. « Il faut continuer de maintenir la pression au quotidien. Parce que nous avons eu un président noir et aujourd’hui une vice-présidente noire, nous ne pouvons pas tenir ces faits pour acquis, et considérer que maintenant tout va bien. Les forces obscures et maléfiques, de même que l’injustice sont toujours là – nous devons donc rester vigilants. »

Au Centre King, cette vigilance implique, en partie, d’œuvrer auprès des nombreux jeunes qui rejoignent les rangs de la Beloved Community Leadership Academy. L’Académie a pour objectif de former des leaders qui comprennent l’interconnectivité du monde, qui ont les outils pour voir au-delà de leur propre intérêt et qui comprennent comment attribuer les occasions qui permettent aux gens de partager équitablement les ressources mondiales. « Lorsque ces jeunes quitteront l’Académie, ils seront des leaders de leur communauté – qu’ils se dirigent vers le monde des affaires, la technologie, les médias et le divertissement – quelle que soit leur carrière, ils auront cet état d’esprit. »

Selon elle, les entreprises peuvent et doivent également prendre part au changement durable. Récemment, elle a d’ailleurs été témoin des changements qui se produisent au sein des entreprises. « J’ai constaté les efforts faits par les communautés d’entreprises pour chercher de manière approfondie et déterminer les éléments nécessaires pour assurer une meilleure inclusion, l’équité et, par-dessus tout, une présence auprès des communautés pour changer les disparités raciales. » Elle a ajouté que les entreprises étaient composées de personnes vivant au sein de communautés partout dans le monde, et qu’à ce titre, elles avaient la responsabilité de participer, de soutenir et de renforcer ces communautés.

« Nous sommes une famille d’êtres humains »

« Cela peut paraître surprenant, mais je n’aime pas le terme “allié », a déclaré Bernice A. King lorsqu’on l’a interrogée sur ce rôle – que ce soit au niveau professionnel ou personnel – au cours du parcours que nous empruntons. « Pour moi, l’allié, c’est la personne qui vient à mon secours – celle qui va m’aider à résoudre mon problème », a déclaré Bernice A. King. « Trop souvent, nous considérons l’injustice et l’inégalité comme inhérentes à la communauté noire – mais ce sont des menaces auxquelles l’humanité en entier fait face. Il est vrai que nous avons des croyances différentes, des cultures différentes, des sexes différents, ainsi que des religions différentes. Mais, malgré tout, la seule chose qui demeure vraie, c’est que nous faisons tous partie d’une famille d’êtres humains. Nous sommes tous interconnectés et reliés les uns aux autres. »

Elle a ajouté qu’à partir du moment où nous commencerons à voir les inégalités et les injustices comme un affront envers toutes les personnes qui occupent notre planète, nous commencerons à prendre la menace de façon personnelle. « Et quand je me sens personnellement visée, j’investis généralement mon temps et mon énergie et je vais aussi loin que nécessaire pour m’assurer de participer et de faire ce qui doit être fait », a déclaré Bernice A. King.

C’est ce qu’elle appelle « diriger avec son cœur. » Il est vrai que les histoires de violence ne nous laissent pas indifférents, et les événements de ces dernières années ont certainement sensibilisé les gens aux problèmes de racisme systémique et d’injustice. « Néanmoins, prendre conscience ne veut pas dire changer. Le changement s’opère lorsque les gens sont touchés en plein cœur. Lorsque nous sommes touchés, nous nous mettons à agir. »

Même si les gros titres relatent des histoires dramatiques et de violence, Bernice A. King est convaincue que ce sont les histoires d’espoir et de transformation qui inspireront les gens à susciter le changement de manière pacifique, véritable et durable. Si l’on fait preuve de curiosité, que l’on écoute attentivement, que l’on collecte les informations et que l’on admet que nous sommes tous concernés, alors d’autres histoires d’espoir et de changement peuvent émerger et donner lieu à des résultats positifs pour tous les êtres humains.

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