L'exploitation financière des aînés est l'une des réalités les plus sombres du vieillissement. Qui plus est, elle passe généralement inaperçue aux yeux de ceux qui n'en sont pas directement victimes.

On s’attend habituellement d’un bon conseiller financier qu’il prenne des décisions de placement avisées, mais il est parfois appelé à remplir d’autres fonctions hors de son champ d’expertise afin d’aider un client. Leanne Kaufman, chef, Successions et fiducies RBC, constate qu’il arrive de plus en plus que les employés de son service se trouvent dans des situations où des clients ou certains de leurs proches ont des inquiétudes au sujet de l’exploitation financière potentielle des aînés.

Dans une de ces situations qui s’est récemment produite, une cliente âgée avait des craintes quant à sa capacité de repousser les demandes d’un enfant adulte qui l’invitait à investir dans une entreprise douteuse.

« Elle arrive à maintenir sa position à l’égard de ce qu’elle considère ou non comme étant un soutien approprié, précise Mme Kaufman. Elle craint toutefois d’être plus vulnérable en vieillissant. C’est pourquoi l’idée de compter sur une personne neutre et indépendante lui plaît. »

L’exploitation financière des aînés est l’une des réalités les plus sombres du vieillissement. Qui plus est, elle passe généralement inaperçue aux yeux de ceux qui n’en sont pas directement victimes. C’est un crime dont la victime n’a souvent pas conscience et qui est souvent, malheureusement, commis par des membres de sa famille ou par des amis proches.

« Le fraudeur se trouve en situation de confiance, explique Mme Kaufman. Il pourrait s’agir des enfants, d’un fournisseur de soins dans un établissement, voire d’un voisin. »

Pour des aînés qui ont, petit à petit, constitué un patrimoine en prévision de leur retraite, apprendre qu’un de leurs proches essaie de profiter d’eux peut être un choc. Par ailleurs, ce crime est de plus en plus fréquent dans notre ère, où les aînés forment une proportion de la population qui croît rapidement.

Selon des données du recensement qui ont été publiées en mai, le nombre d’aînés a augmenté de 20 % au Canada de 2011 à 2016, et la proportion d’aînés dans la population canadienne est maintenant de 16,9 %.

Comme près de la moitié des aînés aurait été victime d’une forme quelconque d’exploitation, il est important pour les aînés, ainsi que pour leurs amis proches et les membres de leur famille, de connaître les signes d’alerte de l’exploitation et de savoir ce qu’ils peuvent faire pour l’éviter.

Disparition d’objets de valeur

On pourrait croire que la seule cause de la perte de bijoux ou de sommes d’argent est le vieillissement du cerveau, mais les spécialistes affirment qu’il s’agit d’un des signes les plus courants d’une éventuelle situation d’exploitation. Les aînés sont souvent ceux qui s’aperçoivent de la disparition d’objets, et ils peuvent en faire mention à un conseiller ou à un membre de la famille.

Activité bancaire anormale

Comme les activités bancaires sont généralement routinières, un changement soudain à ce chapitre peut constituer un signal d’alerte. Ainsi, les paiements de facture débités d’un compte au profit d’une personne inconnue ou les demandes de versement au compte de carte de crédit de quelqu’un d’autre peuvent être des signes d’exploitation. Même une hausse soudaine des retraits pourrait constituer un indice.

L’activité pourrait s’avérer justifiée, mais elle pourrait aussi être le signe qu’une personne presse l’aîné d’accroître ses retraits.

Apparition soudaine d’un nouveau compagnon

L’une des difficultés que pose le décèlement des cas d’exploitation réside dans le flou qui entoure souvent ces situations. Par exemple, lorsqu’un nouvel ami ou un nouvel amoureux apparaît soudainement, il peut être difficile de déterminer s’il s’agit d’une situation d’exploitation ou d’une relation légitime. Si l’aîné est à la banque ou chez un conseiller juridique en compagnie de cette nouvelle personne et qu’il ne semble pas à l’aise en sa présence, cela pourrait indiquer que quelque chose ne tourne pas rond.

Transferts de biens inexpliqués

Le transfert de la propriété d’un bien ou d’un compte bancaire doit faire l’objet d’une évaluation rigoureuse. Il y a eu des cas où des fraudeurs ont convaincu des aînés de leur transférer intégralement la propriété de leur maison ou de leur en céder la moitié afin qu’elle leur revienne au décès de l’aîné.

Modifications inexpliquées apportées au testament ou à la procuration

Une procuration financière permet à une personne désignée d’agir au nom du client à l’égard des affaires juridiques et financières de celui-ci. Il s’agit d’une désignation très importante et tout changement de celle-ci, surtout si le nouveau mandataire n’est pas un membre de la famille ou un ami de longue date, pourrait être un signe qu’une personne essaie de profiter de l’aîné.

Que faire pour éviter l’exploitation

Il est important de garder à l’esprit que l’exploitation financière des aînés est un crime et que bon nombre de services de police disposent d’unités affectées aux personnes vulnérables dont les employés enquêtent sur les situations d’exploitation des aînés et encouragent leur signalement.

Pour mettre fin à l’exploitation financière d’un aîné, il faut toutefois être en mesure de la déceler lorsqu’elle survient. Il est donc essentiel de s’assurer que les protections sont en place avant le moment où il faut éviter une situation d’exploitation ou y mettre fin.

Disposer d’un plan de transfert de patrimoine et faire part de son contenu à la génération suivante ou à d’autres bénéficiaires constitue un bon point de départ. Il importe aussi de veiller à choisir judicieusement le mandataire d’une procuration, qu’il s’agisse d’un membre de la famille, d’un ami ou d’un conseiller juridique. Le mandataire devrait habiter à proximité de l’aîné, être fiable et présenter une situation financière stable.

« Souvent, [les clients] ne prennent pas le temps de bien réfléchir au choix de leur mandataire, ils nomment simplement un enfant », observe Mme Kaufman. « Si l’enfant est aussi celui à qui le parent pourrait difficilement résister s’il lui demandait de l’argent, le parent fait-il le bon choix en le nommant son mandataire ? »

Comme dans l’exemple précédent, compter sur un réseau de professionnels (conseiller financier, comptable, conseiller juridique, etc.) peut apporter un certain degré de protection aux aînés. Ces professionnels peuvent être les premières personnes que consultent les aînés ou les membres de leur famille qui craignent d’être en présence d’une situation d’exploitation. Ils sont aussi bien placés pour déceler les opérations anormales.

Un ami ou un membre de la famille qui soupçonne l’existence d’une situation d’exploitation financière en parlerait d’abord naturellement à l’aîné.

Puisque les fraudeurs s’en prennent aux personnes vraiment vulnérables, il ne faut pas oublier que plus une personne est isolée, plus elle est susceptible d’être une victime. Compter sur un proche, qu’il s’agisse d’un membre de la famille, d’un ami proche ou d’un professionnel de confiance dans le domaine des finances pour faire des chèques peut en soi avoir un effet dissuasif sur les éventuels fraudeurs.

Le présent article vise à offrir des renseignements généraux seulement et n’a pas pour objet de fournir des conseils juridiques ou financiers, ni d’autres conseils professionnels. Veuillez consulter un conseiller professionnel en ce qui concerne votre situation particulière. Les renseignements présentés sont réputés être factuels et à jour, mais nous ne garantissons pas leur exactitude et ils ne doivent pas être considérés comme une analyse exhaustive des sujets abordés. Les opinions exprimées reflètent le jugement des auteurs à la date de publication et peuvent changer. La Banque Royale du Canada et ses entités ne font pas la promotion, ni explicitement ni implicitement, des conseils, des avis, des renseignements, des produits ou des services de tiers.